Congrès ANVP 2024
le 25 mai 2024 s'est tenu le congrès biennal de l'ANVP, à la Maison des associations de Rennes.
Le thème de la journée était : " Et après la sortie, que vont-ils devenir ? "
Victor Hugo a introduit cette journée dans la voix de Basile de Bure, journaliste et animateur de la journée, « Le droit qu'on ne peut retirer à personne, c'est le droit de devenir meilleur. » Et c’est bien le thème de la journée. Comment apporter le petit plus qui fera que chaque personne concernée puisse se poser la question « comment moi à travers mon parcours je peux devenir meilleur aujourd’hui et demain ? »
De par la diversité des intervenants, associations, structures d’accueil, enseignants, cadres de l’administration pénitentiaire, tous ont apporté le témoignage de leurs actions sur le terrain pour accompagner les personnes sous-main de justice dans leur parcours de réinsertion.
Le QPR du CPF de Rennes
La journée a démarré par un zoom sur le Quartier de Prise en charge de la Radicalisation (QPR) de la prison de femmes de Rennes par Aude WESSBECHER Directrice du CPF et François TOUTAIN DFSPIP d’Ille et Vilaine.
Ils ont détaillé l'organisation spécifique de ce quartier "fermé" au sein de la prison, et des démarches mises en oeuvre pour le désengagement des personnes concernées de la violence avant de s'orienter autant que possible vers la déradicalisation et la réintégration dans la société civile.
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Les interventions sur le thème du congrès
Le programme de la journée était articulé en deux parties : la préparation à la sortie et la préparation à la vie professionnelle. Chaque thème était traité par une table ronde rassemblant des professionnels de chaque sujet.
La préparation à la sortie
La table ronde
Les participants à la table ronde étaient Laurent RENAUD – DFSPIP Adjoint SPIP de Mayenne, Patrick MARCHAND – Président de CRESUS de Bretagne, Amandine LE BOURHIS – DPIP SPIP du Calvados, Romuald DANO – Juge d’Application des Peines de l’Orne et avec le regard de Marie-Line HANICOT – DISP Rennes – Grand Ouest.
Les thèmes abordés étaient la santé psychologique, préalable à une réinsertion réussie, les difficultés financières, les conditions judiciaires de la sortie, le logement, c'est à dire toutes les composantes permettant une sortie avec de bonnes chances de réinsertion.
Les initiatives institutionnelles
• Le Pôle Insertion et Prévention de la Récidive – PIPR
Bérangère MONTET – DPIP SPIP du Mans Les Croisettes Sarthe et Dorian HAMDAOUI – Directeur de la Structure d’Aide à la Sortie (SAS) du Mans, ont présenté la dynamique des SAS, avec une sélection des personnes qui pourront intégrer le programme en fonction de leur besoin d'assistance comme en fonction de leur maturité dans leur projet personnel.
C'est à partir de ces bases que le programme peut être efficace.
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• Le module RESPIRE
Murielle TEXIER – DFSPIP Adjointe SPIP Ille et Vilaine, qui a participé à la mise au point du programme RESPIRE - REster Serein Pour Investir des Relations Équilibrées - en a présenté les spécificités : faire travailler les personnes violentes placées sous main de justice sur la gestion de leurs émotions, leur impulsivité et leur agressivité à travers des mises en situation. En effet, une des grandes difficultés des personnes concernées par des passages à l'acte est la difficulté d'accepter, d'identifier et de maîtriser leurs émotions.
Pour traiter ce point les mises en situation se font en groupe avec l'animation d'un binôme spécialement formé au programme et constitué d'un CPIP et d'un surveillant.
• Le Goncourt des détenus
Myriam SCHWAB – Enseignante à la Maison d’Arrêt de Brest et Vincent GERARD – réalisateur de la Société LIVE OUT ont présenté le Goncourt des détenus, à travers un film réalisé par Vincent Gérard qui montre à quel point les personnes intégrées dans le jury du Goncourt des détenus sont impliquées, valorisées et mobilisées par l'activité.
Paroles de détenus sur « les rencontres Goncourt » :
- Moments d'échanges qui permettent d'oublier l'incarcération et favorisent un réel épanouissement »
- « De véritables drogués qui n'en perdront pas une ligne et reprendront toujours des vers »
- « Convivialité heureuse par sa mixité »
- « Espace de vie, de normalité, des moments hors du temps »
- « Ces mardis tant attendus, à échanger sur les livres »
- « Plaisir commun pour nous évader, voyager, rêver, rire et pleurer »
- « Le pouvoir de la lecture : mon oxygène ! »
- « Moment d'évasion, de liberté et d'échanges »
- « On reprend la lecture perdue avec la vie de tous les jours. »
- « Découvrir le plaisir de lire, d'échanger, de partager, d'être écouté et entendu, d'être reconnu »
- « Le Goncourt, je pourrai dire : purée, Moi, j'y ai participé ! »
- « Véritable échappatoire face à l'austérité de la prison
Intervention de la DAP
Invitée par l'ANVP, la DAP était représentée par Marina CECCHIN.
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La préparation à la vie professionnelle
La table ronde
La deuxième table ronde rassemblait Fabienne MARTIN- GOUDET – responsable du dispositif de formation des PPSMJ au Conseil Régional de Bretagne, Ludovic DARDENNE – Directeur de l’association Permis de construire, Olivier BOURQUARD – consultant – membre de la Chaire VE Fondation de l’Université de Rennes, Tiphaine PEDRON – DPIP SPIP de RENNES, sous le regard d’un Visiteur de Prison : Henri SIMORRE.
Toute la difficulté est d'adapter les aides apportées à la personne concernée afin qu'elle soit demandeuse, que les objectifs soient atteignables, que chaque pas réalisé en avant soit au maximum sécurisé pour éviter les retours en arrière, et faire en sorte que les rechutes ne deviennent pas des échecs irrémédiables, mais soient juste une étape de la reconstruction. ... vaste programme, dont la mesure de l'efficacité reste difficile.
Dynamiques Associatives
Ata, bénéficiaire d’Entreprendre Pour Apprendre (EPA), a témoigné sur son cheminement de désistance qui commence par l'acceptation des faits, sans pour autant se considérer réduit à ses actes.
Une fois l'acceptation de ses actes, quelle qu'en soit la gravité et la compréhension de la peine prononcée, peut commencer le travail de projection dans l'avenir, de construction de la personne qu'on aura plaisir à regarder dans le miroir.
Tout cela ne peut se faire seul et l'assistance des mains tendues comme l'association EPA est fondamentale.
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Sur le constat que chaque association travaillant dans le secteur de la pénitentiaire n'a pas la puissance pour peser sur le système, Marion MOULIN – Déléguée Générale de l’association Possible a présenté cette association qui veut ouvrir le champ des possibles et en particulier permettre de regrouper une trentaine d'associations dans le but de témoigner ensemble et de promouvoir une autre idée de la prison.
Les travaux communs permettront de présenter des positions et plaidoyers plus percutants et d'autant plus puissants que le nombre d'associations représentées sera grand. L'objectif est notamment d'intéresser presse et grand public au problème des prisons si important et cependant oublié de tous/
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Gabi MOUESCA – Directeur de la ferme EMMAÜS de Baudonne, Gabi Mouesca a pointé combien, quelle que soit la gravité de la faute, le respect de la personne et le choix d'une peine adaptée est fondamental si on veut aider la personne à se reconstruire pour enfin rejoindre la société civile.
En dirigeant la ferme Emmaüs de Beaudonne, il accueille des femmes placées par la la Justice pour purger des peines adaptées à leur situation en évitant la case prison. Le choix de la peine faite par les magistrats est fondamental pour la qualité du suivi et la capacité du condamné à accepter, comprendre sa peine puis rebondir.
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Conclusion
Yves-Marie BRIENT, Président de l'ANVP a conclu la riche journée.
Beaucoup d'initiatives positives sont mises en place, que ce soit par l'Administration Pénitentiaire ou par des associations. Malheureusement, faute de moyens, toutes ces actions très utiles ne touchent qu'une très petite partie des personnes sous main de justice.
Les visiteurs de l'ANVP sont témoins, à travers les personnes visitées, des actions mises en place mais aussi du manque de moyens disponibles.
La présence des visiteurs auprès des personnes placées sous main de justice, en détention ou en milieu ouvert s'inscrit dans tout ce cheminement de désistance. Leur action est un des maillons qui contribuent notamment à faire prendre conscience aux personnes concernées que la société civile, représentée par les visiteurs ne les oublie pas.
Pour conclure, un congrès très réussi avec un moment fort de recueillement à la mémoire des agents pénitentiaires décédés et de belles émotions par la très belle prestation de slam Mélissa. Egalement un grand merci à l'équipe d'organisation qui a "assuré" !
Oui, le droit de devenir meilleur appartient à chacun. A nous visiteuses/visiteurs, de les aider à croire en eux comme nous croyons en eux.
Slam par Mélissa Plaza
En sus des présentations sur le thème de la journée, l'audience a eu le plaisir d'écouter une prestation de Mélissa Plaza, slammeuse, ancienne footballeuse professionnelle, puis docteur en psychologie sociale, qui avait écrit un texte spécialement à l'intention des visiteurs de prison, ce dont nous la remercions vivement.
L'audience a été prise par la main grâce à l'expressivité, la présence, la force du discours de Mélissa qui a dressé un portrait autant des visiteurs de prison que du système pénitentiaire et ses difficultés.
Les chanceux qui avaient pu l'écouter la veille l'avaient entendue sur d'autres thèmes forts comme le patriarcat dans le foot, la place des femmes....
Un grand bravo à Mélissa Plaza pour ses prestations et ses messages puissants !
Pour plus de détails, lire, sur son blog, l'article en lien de Xavier Denecker, ancien Président de l'ANVP, et lire le livre de Mélissa Plaza "Pas pour les filles" éditions Robert Laffont.
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31/05/2024